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patchworkman's blog
10 mars 2006

LE CHAT NOIR

DVD

LE CHAT NOIR

(Il Gatto nero)

de Lucio Fulci (1981)

affiche

Jouez hautbois, résonnez musettes, voici venu le moment du DVD mensuel proposé par "Mad Movies"! D'aucuns estimeront d'un goût douteux la sélection de ce "Chat noir" à l'heure où la France profonde, celle qui carbure au Pernault, sacrifie nos amis aux pattes de velours sur l'autel de la grippe aviaire... Mais comme le bon goût n'a strictement rien à voir avec toute série Z qui se respecte, on ne pourra pas reprocher à "Mad" d'être hors sujet, tant il est vrai que Lucio Fulci peut prétendre au rang de maître dans notre catégorie "bon mauvais" (1).

En effet, une analyse sommaire du style du bonhomme suffit à nous assurer qu'il a bel et bien les qualités (!) requises pour faire partie de ce club très fermé. En tout premier lieu, condition sine qua non, il s'avère bien entendu un réalisateur exécrable, sa mise en scène se résumant à:

1°) des zooms dont l'abondance le dispute à la gratuité. De fait, Fulci zoome systématiquement sur tout ce que son accessoiriste introduit sur le plateau: deux personnages devisent-ils en sirotant un café, qu'il se sent obligé de nous précipiter le sucrier en pleine figure ou de nous faire effectuer un plongeon dans le pot de lait. Très rapidement, on se surprend à remercier le scénariste de nous avoir épargné une conversation autour d'un osso-bucco ou d'un plat de bolognaises!

2°) des gros plans systématiques, résultant le plus souvent des zoom sus évoqués. Ainsi Fulci, cherchant sans doute à chasser sur les terres de Sergio Leone, multiplie les gros plans sur les yeux des personnages, à tel point que l'on finit par se demander s'il n'est pas sponsorisé par Afflelou! Je n'ai pas compté, mais je ne pense pas être excessif à évaluant à plus d'une centaine les gros plans d'yeux dans ce seul film. En plus, il y a de la matière: son principal interprète Patrick Magee (l'inquiétant paralytique d'"Orange mécanique") se trouvant affligé d'hirsutisme sourcilaire, Fulci se délecte à plonger au plus profond de cette jungle inextricable, comme s’il y cherchait quelque confirmation de l’existence de Dieu - questionnement spécieux: si Dieu existait, il n’y aurait pas de réalisateurs aussi lamentables! Autre tic récurrent, Magee est systématiquement filmé en plongée et devant un mur de magnétophones, ce qui, je suppose, constitue dans l’esprit embrouillé de Fulci une sorte d’hommage au chef d’oeuvre de Kubrick...

3°) une débauche de caméra subjective, et de préférence au ras du sol, Fulci passant le plus clair de son film à cavaler après le fameux chat qui semble éprouver un malin plaisir à ne pas se laisser filmer (mettez-vous à sa place!), tout en se prenant régulièrement les pieds dans les fils des projecteurs! Conseil: avant d’enfiler le DVD dans le lecteur, avalez un cachet de Nautamine, sans quoi c’est la gerbe assurée!

Bon, pour la mise en scène c'est réglé. Voyons à présent la direction d'acteurs: si j'étais feignant, je vous dirais également que c'est fait, vu qu'elle est inexistante. En fait il y a deux catégories d'acteurs: les pros, constamment en roue libre, et les autres, figés au beau milieu des plans comme les potiches du télé-achat. Côté stars, Magee en fait des mégatonnes, grimace, roule des yeux et bave dans tous les coins. À cet égard, la séance de spiritisme qu'il nous offre restera dans les mémoires: positivement épileptique, il entre en vibration, s'arrache la perruque, s'épile les sourcils, dégringole de son fauteuil et s'abstient in extremis de faire pipi par terre! Quant à Mimsy Farmer, visiblement pas encore redescendue de son trip de "More", elle traverse le film comme une somnambule sous Tranxène.

Au rayon comique involontaire (ça fait partie du cahier des charges, je vous rappelle!), ce sont les scènes impliquant le chat meurtrier qui se révèlent les plus délectables. Il faut avoir vu les victimes fuir devant ce pauvre matou, le visage déformé par la terreur, comme s'ils avaient aux basques le T-Rex de "Jurassic Park"! Celui-ci, au terme d'une course poursuite interminable visiblement filmée à plat ventre sur un skate-board, escalade une façade pour échapper au monstre feulant, se casse la gueule et termine empalé sur une grille. Ces deux-là finissent asphyxiés dans un réduit après que le chat en ait piqué la clef (lol!) et obstrué la climatisation avec ses poils (sic!). Sans oublier les attaques frontales, lors desquelles il lacère les infortunés dans de grands jaillissements d'hémoglobine et ouvre dans leurs chairs des plaies irrémédiables que Freddy Krueger n'aurait pas reniées!

Par ailleurs, ces meurtres félins sont d'autant plus surréalistes qu'on demeure dans l'ignorance de ce qui les motive, le scénario étant à peu près aussi étoffé qu'une dentelle de Bruges... Vous avez Magee qui hante les cimetières muni d'un magnétophone et interviewe les morts, le micro orienté vers les pierres tombales (hilarant!), un chat qui bousille son monde et de préférence des gens dont on se demande ce qu'ils ont à voir avec l'intrigue centrale (pour autant qu'il y en ait une et ça, j'en suis pas vraiment sûr!), un flic falot qui enquête mollement, une Mimsy Farmer photographe et hallucinée qui soupçonne une connexion jamais explicitée entre le médium et le greffier, et démerdez-vous avec ça!

Et Edgar Poe, là-dedans? Ben c'est un peu la star censée racoler le chaland et, à cet égard, on ose à peine imaginer ce qu'il aurait répondu à Magee si celui-ci s'était aventuré à interviewer sa stèle! Fulci justifie sa référence par deux scènes extraites de sa célèbre nouvelle, et greffées à la va-comme-je-te-pousse sur son scénario foireux. Premièrement, la pendaison du chat effectuée par un Magee désireux de mettre fin à la tuerie, et donnant à Fulci l'occasion de défouler les instincts sadiques qui caractérisent la totalité de ses films. Deuxièmement, l'emmurement final d'une Mimsy Farmer toujours aussi asthénique en compagnie du chat dénonciateur: Fulci renoue ici avec le thème de l'"enterrement vivant", obsession qu'il partage avec Poe et récurrente dans nombre de ses oeuvres ("L'Emmurée vivante" et "Frayeurs" notamment).

Oui, je sais, tout cela est bien nul... Mais qu'est-ce que c'est bon!

Notes

(1): pour une définition de ce concept très particulier, voir ma rubrique du 13 Février.

le_20chat_20noir__

Le Chat noir...

fulci2_

...un film de Lucio Fulci...

magee

...avec Patrick Magee...

mimsy1

...et Mimsy Farmer!!!

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Commentaires
P
Je ne te le fais pas dire.
P
Ben alors? On achète plus "Mad Movies"?<br /> Excellente lecture, Catwoman (en plus elle est sex!) C'est lequel que tu lis?
P
Eh ben dis donc<br /> Potom
P
Inconnu au bataillon !<br /> J'me retourne à CatWoman !
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